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News Dessins
18 avril 2008

Portrait de Wolinski - sur VSD.fr - par Laurence Durieu - 22 avril 2008

G

Ses impérissables dessins côtoient ceux de ses camarades Cavanna, Siné, Cabu et Gébé dans Mai 68 (éd. Michel Lafon). À l’époque, Georges Wolinski avait 34 ans, et il lance aujourd’hui: « On a fait 68 pour ne pas devenir ce que nous sommes devenus…» Inspiré par la vie, la politique et la fesse, mais aussi par la loi sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics, l’amateur de havanes signe un album réjouissant, Défense de fumer ! (Le Cherche-Midi). On y retrouve toute la fantaisie de ce pessimiste joyeux, droit et drôlement élégant.

NAISSANCE le 28 juin 1934, à Tunis. Ziegfried, son père, est assassiné lorsque Georges a 2 ans. Juif polonais à la tête d’une entreprise de ferronnerie d’art, il renvoie une partie du personnel au moment du bouleversement des lois sociales de 1936. L’un des licenciés l’abat dans son bureau, d’un coup de revolver. Georges a conservé un dessin à l’encre de Chine réalisé par son père, représentant un juif errant.

PREMIER SOUVENIR. Quelqu’un de la famille lui rapporte d’Autriche une culotte en peau. Il la met à l’école, les élèves se moquent de lui.

GI. À Tunis, le QG des GI fait face à la pâtisserie des parents de sa mère, Lola, une juive d’Italie. Les enfants leur demandent du chocolat, et Georges des comics, dont Terry and the pirates.

LIRE. Sa famille de commerçants est aussi intello. Il est mauvais élève, mais il dévore la bibliothèque familiale : Jules Verne, Dickens, Kipling, Marc Twain, Edgar Poe, James Joyce, Marcel Aymé… Et les dessins de Daumier. Une de ses premières parutions dans Hara-Kiri est une illustration de La Légende des siècles, de Victor Hugo.

ATHÉE. Son grand-père organise sa bar-mitsva. Il en garde un bon souvenir grâce aux cadeaux reçus. Il aime bien la gaieté des fêtes religieuses en famille, mais il ne croit en rien. Il rentre aujourd’hui d’un voyage en Inde, où il s’est senti étouffé par les castes religieuses et le mysticisme de la réincarnation, omniprésent. « La clé de l’humour, c’est dire la vérité. Je suis seul et j’ai peur… Je vais crever. Et le plus terrifiant, c’est qu’il n’y a rien derrière. »

ALPES. Sa mère, tuberculeuse, part se soigner en France, à Briançon. Elle revient trois ans plus tard, remariée à l’intendant du sanatorium et convertie au catholicisme. « Mon beau-père, Paul, portait le béret, il était très français et très gentil. » À 12 ans, Georges les rejoint. La France, les montagnes, un lycée mixte… Le rêve.

PREMIER BAISER avec Renée, au lycée de Briançon, « une trouille extraordinaire ». Il aime la regarder sur son vélo, elle fait tomber sa jupe à l’arrière et s’assied directement sur la selle… « J’ai été dépucelé dans les bras d’une jeune malade au sanatorium. Elle riait chaque fois que je passais devant sa chambre. J’avais beau avoir lu, vu des dessins, je ne savais pas ce qu’il fallait bouger. »

FAMILLE. Il veut devenir architecte mais, après deux ans aux Beaux-Arts, il travaille pour la bonneterie des beaux-parents. Georges se marie avec Kean, rencontrée au lycée en 1958. Huit ans plus tard, elle se tue dans un accident de voiture, sur la route des vacances, vers Juan-les-Pins. Ils ont deux filles, Frédérica et Natacha. Georges aura une troisième fille, Elsa, avec sa seconde épouse, Maryse.

DÉSERT. Pendant son service militaire dans l’Algérie en guerre, il repère dans un journal une affiche publicitaire pour Hara-Kiri, signée Roland Topor : un poing dans la figure. En 1960, lors d’une permission, il propose ses dessins à Cavanna, qui les prend sur-le-champ. À son retour, en 1961, il entre dans la famille du « mensuel bête et méchant » qui cédera la place à Charlie (1969), puis Charlie Hebdo (1970).

MAI 68. Action, le journal des comités d’action de l’Union des étudiants communistes, lui commande un dessin politique. Alors que Georges dit ne rien y connaître, Siné le traite calmement de connard. Il se met à lire Le Monde. Il saute sur son Solex et, de Saint-Mandé (94), rejoint les manifs. Celle des Champs-Élysées le réjouit : les manifestants descendent toute l’avenue devant des CRS surpris et dépassés. Il fonde L’Enragé avec Siné. Après un dessin au second degré sur le PC, il reçoit un coup de fil d’un membre du parti, furieux. Mais, dès 1977, L’Huma publiera du Wolinski en une.

CULTE. À 11 ans, il achète son premier livre, des dessins d’Albert Dubout. Grand fan, pour l’organisation du centenaire de sa naissance, en 2005, il sollicite Jacques Chirac, rencontré en vacances à la Réunion. Puis il reçoit une lettre de la présidence qui veut lui remettre la Légion d’honneur. Chirac, qui l’appelle « le maître », dit : « Dubout ne l’a pas eue, je vais la donner à Wolinski. »

TACLE. Sur son plateau, Laurent Ruquier déclare : « Moi, Wolinski ne me fait pas rire. » Qui lui balance : « Je suis un grand admirateur de Dubout car il arrivait à faire rire même les cons, ce que je n’arrive pas à faire. » Ruquier se marre.

Cet article de Laurence Durieu est extrait de VSD.fr

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